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Diversification d’un CRA

Évaluation immobilière au Canada

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2016 – Volume 60 – Tome 2
Diversification d’un CRA
Leigh Walker

Voici un exemple de la façon dont un CRA a réussi à diversifier sa pratique.

Leigh Walker, CRA, est associé directeur général au cabinet d’évaluation immobilière Lawrenson Walker Appraisers de Vancouver, en Colombie-Britannique, un cabinet spécialisé dans les évaluations résidentielles. Leigh travaille dans le secteur immobilier depuis 1993 et a reçu l’accréditation CRA (évaluateur résidentiel canadien) de l’Institut canadien des évaluateurs (ICE). Il est aussi membre du Greater Vancouver Real Estate Board (GVREB), de l’Association canadienne de l’immeuble (ACI) et de la Mortgage Brokers Association of BC (MBABC). En 2011, Leigh a été élue au Conseil d’administration du chapitre de Vancouver de l’ICE et a été nommé au Conseil d’administration de l’association de l’ICE en Colombie-Britannique.

Propriétés détériorées

Quelle est la signification du terme propriété détériorée pour un évaluateur professionnel?

Les propriétés détériorées se définissent par la présence de caractéristiques particulières qui ont des effets négatifs pour leur valeur. Il peut s’agir de caractéristiques physiques, de facteurs géographiques ou légaux, d’éléments de stigmatisation, etc. Dans ma pratique, les facteurs de propriété détériorée qui se présentent le plus souvent concernent la culture de la marijuana, les aspects de copropriété dans le cadre de grands projets immobiliers ou d’évaluations spéciales, les sites contaminés et, occasionnellement, les scènes de crime.

Existe-t-il un volume de travail important dans ce secteur particulier?

Mon entreprise ne recherche pas ce type d’évaluation, mais notre marché fait en sorte que nous rencontrons un certain pourcentage de propriétés détériorées. Malheureusement, la culture de la marijuana – légale ou illégale – est présente dans notre secteur d’opérations. Il existe environ 20 000 sites de culture illégale de marijuana en Colombie-Britannique; 4 000 à Vancouver uniquement. Lorsque vous ajoutez à ce total les anciens sites de culture et les opérations de culture légales, et bien, ce scénario se présente souvent lors de nos évaluations. Je dirais que ma firme rencontre des cas de propriétés qui ont servi à la culture de la marijuana une ou deux fois par semaine, une fréquence constante depuis les dernières années.

Comment avez-vous commencé à réaliser des évaluations de propriétés détériorées?

Au milieu des années 1990, la Colombie-Britannique a vécu ce qu’on a nommé la « Leaky Condo Crisis » (crise des condos touchés par des infiltrations). Pendant cette période, un grand pourcentage de copropriétés construites dans une période précise ont connu d’importants problèmes d’infiltration d’eau provoqués par la défaillance prématurée de l’enveloppe du bâtiment. Le coût total des réparations pour ces « condos perméables » a atteint environ 4 milliards de dollars. Pendant cette période, je réalisais un grand nombre d’évaluations pour un assureur hypothécaire qui se retrouvait au milieu de cette crise et dont la situation devenait plutôt « périlleuse » au point de vue de la sécurité hypothécaire. C’est à ce moment que j’en ai appris beaucoup sur la façon d’évaluer une propriété détériorée.

Avez-vous suivi des cours de perfectionnement dans ce secteur de l’évaluation? 

À ce moment-là, il n’existait pas d’occasions de perfectionnement pour l’évaluation de ce type de propriétés. J’ai plutôt tenté d’être créatif dans mes recherches. J’ai établi des contacts avec des intervenants œuvrant dans les industries de l’inspection des bâtiments et de la restauration des sites. Cette démarche m’a aidé à mieux comprendre comment les opérations de culture de marijuana peuvent affecter une maison.

Pour mieux comprendre des enjeux de copropriétés, j’ai suivi des cours offerts par le Greater Vancouver Real Estate Board. Les cours étaient conçus pour les courtiers immobiliers, mais ils étaient extrêmement utiles dans une perspective d’évaluation. Je suis aussi devenu bénévole pour plusieurs conseils de copropriétés, comme président ou simple membre. Cet investissement personnel m’a donné l’occasion d’apprivoiser la Strata Property Act (Loi sur la copropriété) et de mieux comprendre comment les sociétés de condominiums font face aux difficultés financières et aux enjeux entourant les réparations.

Mon meilleur apprentissage est toutefois venu d’un fantastique mentorat. Rien ne peut vraiment remplacer la transmission des connaissances d’une génération à l’autre. Mon mentor était Don Lawrenson, CRA. Je me suis joint à sa firme, Don Lawrenson and Associates Ltd., en 1996 et j’ai acheté l’entreprise en 2007. Don œuvre toujours comme évaluateur chez nous. 

Comment vous assurez-vous de rester dans le champ d’activité d’un CRA lorsque vous réalisez une évaluation pour ce types de propriétés?

À mon point de vue, je dois simplement m’en tenir aux Normes uniformes de pratique professionnelle en matière d’évaluation au Canada (NUPPEC). Nous gardons l’œil sur le zonage, l’utilisation optimale, les copropriétés d’un maximum de quatre unités, le potentiel de développement, etc. Nous avons en outre créé des relations avec un certain nombre d’entreprises commerciales et nous leur confions régulièrement des affectations lorsque nous risquons d’aller au-delà de notre champ d’activités. Un CRA doit bien comprendre son champ d’activités. Il ne devrait jamais accepter des affectations qui ne font pas partie de son champ de compétences. À l’inverse, je crois fermement que les AACI qui ne répondent pas aux exigences de compétence pour réaliser des évaluations résidentielles, puisqu’ils travaillent principalement dans le secteur immobilier commercial, devraient transmettre ces affectations à un CRA. Les exigences de compétence, ce n’est pas un sens unique.

Quelles sont les compétences d’évaluateur les plus sollicitées lors d’une évaluation de propriétés détériorées?

Vous devrez utiliser vos talents d’enquêteur, vos habiletés de recherche et votre connaissance du marché. Ce qui est le plus intéressant, c’est d’utiliser vos compétences pour mieux comprendre la réaction du « marché » face à une détérioration en particulier. Va-t-elle effrayer les acheteurs ou les prêteurs hypothécaires? Dans l’affirmative, comment la valeur sera-t-elle affectée?

Quels sont les défis les plus importants lors de l’évaluation de propriétés détériorées?

Les types de propriétés qui sont considérées comme détériorées sont en constante modification. Comme indiqué plus tôt, une grande partie de mon travail a été consacrée à l’épisode des « condos perméables » vers la fin des années 1990. De nos jours, il reste très peu de ces cas, mais les cas de culture de marijuana sont beaucoup plus nombreux. Je suis certain que, dans le futur, j’aurai à travailler avec d’autres types de propriétés détériorées.

Ce qui a été stimulant et intéressant, c’est de déterminer comment les différents sous-marchés évaluaient les propriétés qui avaient hébergé des sites de culture. Selon le marché et ses tendances, l’effet d’une stigmatisation associée à une propriété peut être complètement différent. Par exemple, je suis sûr que la population de la Colombie-Britannique ne voit pas ces propriétés du même œil que les habitants des autres provinces. Même en Colombie-Britannique, le degré de stigmatisation associée à des opérations de culture et la durée du stigmate peuvent varier d’un quartier à l’autre. Les politiques des prêteurs et assureurs hypothécaires portant sur les maisons qui ont déjà hébergé des sites de culture peuvent également varier en fonction des conditions du marché; tout ce mouvement peut parfois devenir difficile à suivre.

Que trouvez-vous gratifiant dans ce type de travail? 

L’évaluation des propriétés détériorées est vraiment intéressante. La plus grande partie des évaluations que je réalise pour des besoins hypothécaires est souvent monotone. C’est stimulant de se voir attribuer une évaluation qui sort des sentiers battus. Ce type de travail a bien sûr rendu ma pratique plus difficile, mais d’un point de vue personnel, il m’a permis de devenir un évaluateur plus complet.

Est-ce que vous recommandez ce type de travail pour les évaluateurs?

Tout à fait. Je crois qu’il est important pour un évaluateur de vouloir réaliser des évaluations qui sont plus difficiles et d’être en mesure de le faire. C’est frustrant d’entendre qu’un évaluateur a refusé une évaluation résidentielle simplement parce qu’elle était difficile. Si une évaluation est trop difficile pour un membre désigné de l’organisme d’évaluation le plus importante au pays, alors QUI est qualifié? Je ne propose pas d’aller au-delà de nos compétences, mais nous devons accepter les affectations difficiles; pour un évaluateur, il s’agit là d’une véritable occasion d’améliorer ses connaissances et de développer l’ensemble de ses compétences.

Quels conseils ou suggestions donneriez-vous à un évaluateur qui voudrait prendre une affectation pour une propriété détériorée?

Mon meilleur conseil, c’est : « ralentissez et prenez votre temps ». Communiquez avec votre client avant la fin de l’évaluation pour les informer de la situation; ça aussi, c’est une bonne idée. Enfin, si vous êtes nouveau dans le domaine, travaillez en étroite collaboration avec un mentor, rappelez-vous que le rapport doit toujours être en conformité avec NUPPEC.