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Pratiques exemplaires – exemples sur le terrain

Évaluation immobilière au Canada

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2016 – Volume 60 – Tome 1
Pratiques exemplaires – exemples sur le terrain
Allan Beatty, Peter Lawrek, Gordon Tomiuk, David Babineau, John Shevchuk, Robert Robson

En collaboration avec les membres bénévoles du Sous-comité d’appel :
Allan Beatty, AACI, P.APp, Fellow; Peter Lawrek, AACi, P.App;
Robert Robson, AACI, P.APp, Fellow; Gordon Tomiuk, AACI, P.APp, Fellow; David Babineau, AACI, P.APp, Fellow; ET John Shevchuk, AACI (Hon)

Cet article, qui résulte d’une collaboration du Sous-comité d’appel, est le premier d’une série à paraître dans les numéros trimestriels de la revue Évaluation immobilière au Canada en 2016. Les Normes uniformes de pratique professionnelle en matière d’évaluation au Canada (NUPPEC) portent sur un niveau de pratique pouvant se décrire comme une conformité obligatoire minimale permettant de rencontrer la norme de l’« évaluateur raisonnable ». Il existe tout un niveau de rendement dépassant le strict minimum généralement appelé « pratiques exemplaires ». Le sous-comité a tiré des exemples de son expérience collective et donne des conseils pour en faire toujours plus, tout en assurant la conformité.

Pensez comme un acheteur – considérez les options

En faisant une évaluation, en expliquant la valeur à un client/acheteur ou en déposant à titre de témoin expert, il est utile de se mettre à la place de l’acheteur, de penser aux alternatives qui s’offrent à lui et de tenir compte du marché.

Prenez l’exemple d’une parcelle de terrain qu’on vous demande d’évaluer. De toute évidence, l’évaluateur devrait utiliser des ventes de terrains comparables pour estimer la valeur marchande, mais il est aussi important de penser comme un acheteur qui ne peut avoir les biens immobiliers qui sont vendus maintenant. L’acheteur doit trouver une parcelle de rechange. Ainsi donc, l’évaluateur devrait utiliser non seulement les ventes, mais toute inscription pertinente de terrain à vendre. Les inscriptions peuvent être un point de référence utile sur l’état du marché à la date réelle de l’évaluation. S’il n’y a aucun bien immobilier pertinent à vendre, peut-être que la valeur marchande courante du terrain visé est plus élevée qu’on ne le croyait au départ (en raison de l’offre et de la demande). S’il y a plusieurs autres sites à acheter, peut-être que la valeur du terrain visé devrait être ajustée à la baisse.

Par conséquent, rappelez-vous de vérifier les biens immobiliers disponibles en plus des ventes et pensez à une explication similaire à l’exemple ci-dessus. Dites au lecteur s’il y a des alternatives. Usez de vos compétences pour faire une analyse comparative appropriée des inscriptions, tout comme vous le feriez s’il s’agissait de ventes réelles.

Cette procédure semble évidente, mais beaucoup d’évaluateurs peuvent la négliger. D’autres facteurs à considérer sont les motivations qui sous-tendent les ventes. Une histoire intéressante se cache habituellement derrière chaque marché. De plus, songez à la tendance de l’économie locale. Par exemple, un marché immobilier qui dépend de l’exploration du pétrole et du gaz naturel pourrait offrir des prix immobiliers en déclin. Toutefois, cela ne peut être un facteur que ne reflètent pas les données de vente, si les ventes sont survenues avant le déclin. Les prix courants peuvent donner un aperçu lorsque les conditions du marché changent soudainement.

La règle applicable de la norme visant les activités d’évaluation des NUPPEC est 6.2.15 : « décrire et analyser toutes les données pertinentes au contrat de service ». Ne vous limitez pas aux seules données de vente quand les ventes ne racontent peut-être pas toute l’histoire.

Collaborateur : Peter Lawrek, AACI, P.App

Le test des trois fois

Au cours de ma carrière, j’ai eu le privilège d’accompagner plusieurs stagiaires. Un conseil que je leur ai donné est d’utiliser le « test des trois fois » quand ils se retrouvent devant tout aspect d’un contrat de service qui est inhabituel.

Ce que j’appelle le test des trois fois, c’est tout aspect atypique d’un contrat de service qui devrait être traité au moins trois fois dans le rapport d’évaluation, pour s’assurer que le lecteur du rapport ne le perde pas de vue. Par exemple, prenons l’évaluation d’un bien immobilier qui comprend une hypothèse extraordinaire et qui présume que cette hypothèse extraordinaire implique un changement de zonage.

Ce test des trois fois serait cette hypothèse abordée au moins trois fois dans le rapport. La première fois pourrait être dans la lettre d’accompagnement, où les résultats de l’évaluation sont normalement résumés. La deuxième fois pourrait être dans une section distincte du rapport dressant le sommaire des hypothèses extraordinaires et/ou dans la section des conditions limitatives (rappelez-vous qu’en introduisant une hypothèse extraordinaire, souvent vous devez y joindre une condition limitative exceptionnelle). La troisième fois pourrait être dans la description des contrôles de l’utilisation des terres et/ou dans la discussion sur l’utilisation optimale.

Encore mieux, les pratiques exemplaires donnent à penser que, lorsqu’une telle hypothèse critique est faite dans un rapport, l’évaluateur devrait songer à inclure cette hypothèse partout où figure l’estimation de la valeur. Cela pourrait se lire ainsi : « l’estimation de la valeur marchande, ‹ dans le nouveau zonage ›, est de XXX $ ». Vous pourriez penser à indiquer la limite sur la page titre du rapport. Ces suggestions veulent rendre clair que votre rapport vise des circonstances spéciales dont le lecteur doit être informé pour bien comprendre l’estimation de la valeur.

Le test des trois fois vous donne une certaine assurance que votre rapport d’évaluation ne pourra pas tromper un lecteur. Voici des exemples courants où les conditions d’un contrat de service passent la rampe :

  • évaluations à partir de plans, ou autres conditions où l’on requiert une valeur ‹ comme si complété › ;
  • mandat qui oblige l’évaluateur à ignorer une condition connue (p. ex. un défaut de construction ou une condition nuisible comme la moisissure);
  • évaluation pour des fins légales, comme une expropriation; et
  • évaluations rétrospectives.

Il est à noter que ce conseil n’est pas une exigence des NUPPEC 2014, mais il est offert comme suggestion de pratique exemplaire. Quand on peut conclure qu’un rapport est susceptible de tromper le lecteur, il vaut mieux errer du côté de la prudence. Un rapport réputé trompeur est une allégation grave et il pourrait entraîner une violation de l’éthique (voir la règle 4.2.3 et le commentaire 5.3 de la norme relative aux questions d’éthique dans les NUPPEC). Un rapport trompeur peut résulter d’une ‹ omission › ou d’une ‹ commission › due à une grave erreur ou encore à une combinaison d’erreurs moins graves qui, mises ensemble, font qu’un rapport est considéré comme trompeur.

Le test des trois fois est un instrument utile pour assurer que ni une omission erronée ni une erreur par commission ne mènerait à la conclusion que votre rapport pourrait tromper le lecteur.

Collaborateur : Allan Beatty, AACI, P. App., Fellow

Quand la valeur marchande n’est pas la bonne réponse

Pour les membres de l’ICE en Ontario, en Alberta, au Manitoba, au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse, la législation provinciale en matière d’expropriation crée une obligation supplémentaire pour l’évaluateur après avoir réglé la question de la valeur marchande traditionnelle. Cette composante du contrat de service d’évaluation concerne le ‹ rétablissement équivalent › ou la notion d’‹ une maison pour une maison ›.

En Ontario, la loi encadre ainsi le travail de l’évaluateur :

Augmentation par la Commission
15. Sur demande à cet effet, et après avoir fixé, aux termes du paragraphe 14 (1), la valeur marchande du bien-fonds qu’un propriétaire utilise à des fins d’habitation, la Commission adjuge par ordonnance au propriétaire l’indemnité supplémentaire qu’elle estime nécessaire afin qu’il puisse se réinstaller dans un logement au moins équivalent au logement exproprié.

C’est là un domaine que la grande majorité des autorités expropriantes tendent à ignorer, sans inconvénient, alors qu’elles traitent seulement la question de la valeur marchande traditionnelle. Cependant, selon les conditions du marché local à la date d’évaluation, un propriétaire exproprié peut avoir beaucoup de difficulté à remplacer sa maison dans le voisinage de l’habitation expropriée. La plupart des propriétaires expropriés ont des raisons valides de rester dans un secteur particulier, comme les limites d’un arrondissement scolaire, la proximité de leur emploi, de leur famille, leurs amis et leurs docteurs. Dans ce cas, après avoir estimé la valeur marchande traditionnelle, la tâche de l’évaluateur est de regarder quels biens immobiliers étaient disponibles pour la relocalisation du propriétaire.

On a interprété le ‹ rétablissement équivalent › de plusieurs façons. Cela peut être plus que remplacer les caractéristiques de l’habitation, qu’il s’agisse du nombre de chambres à coucher ou de salles de bain. Cela peut inclure des commodités comme l’aménagement paysager, une grange, une clôture, un court de tennis, etc. Dans un cas, il incluait une vigne de trois acres développée et entretenue par la famille du propriétaire comme une activité récréative et familiale.

Le concept dont l’évaluateur doit se souvenir se résume dans la cause Régie des transports en commun de la région de Toronto c. Dell Holdings Ltd., où la Cour suprême du Canada interprète les lois concernant l’expropriation de la manière suivante :

voirs gouvernementaux qui n’est exercéL’expropriation d’un bien est l’un des pou« qu’en dernier ressort. L’expropriation totale ou partielle d’un bien appartenant à une personne constitue une grave perte ainsi qu’une atteinte très importante aux droits privés de propriété des citoyens. Il s’ensuit que le pouvoir d’une autorité expropriante devrait être interprété de façon stricte en faveur des personnes dont les droits sont touchés. »

Les règles applicables de la norme relative aux activités d’évaluation des NUPPEC incluent :
Règle 6.2.2 : [l’évaluateur doit préciser] l’utilisation prévue de ses opinions et de ses conclusions ;

Règle 6.2.3 : [l’évaluateur doit préciser] l’objectif du contrat de service, y compris une définition pertinente de la valeur à déterminer;

Règle 6.2.4 : [l’évaluateur doit préciser] l’envergure des travaux requis pour réaliser le contrat de service; et

Règle 6.2.15 : [l’évaluateur doit] décrire et analyser toutes les données pertinentes au contrat de service, ainsi que toute hypothèse extraordinaire et/ou condition limitative exceptionnelle pertinente.

Il va sans dire que les responsabilités de l’évaluateur sont beaucoup plus grandes que pour un contrat de service normal lorsqu’il travaille dans une province appliquant la disposition de rétablissement équivalent dans sa législation sur l’expropriation. Les membres devraient également savoir que plusieurs provinces ont plus d’une loi prévoyant l’acquisition obligatoire, alors que les dispositions sur la compensation peuvent varier, même au sein d’une province.

Conformément aux NUPPEC, les membres de l’ICE doivent respecter les exigences de la législation et/ou de la délivrance de permis pour tous les types de contrats de service professionnels. Dans certaines provinces, la législation peut limiter les qualifications d’un évaluateur et avoir précédence sur les NUPPEC.

Collaborateur : Bob Robson, AACI, P. App., Fellow